Chapitre 2: La formation du contrat d’assurance

Section 1: Les caractéristiques du contrat d’assurance

Le contrat d’assurance est de nature synallagmatique, engendrant des obligations mutuelles pour chaque partie impliquée. Il implique que le souscripteur doit s’acquitter de la prime d’assurance, tandis que l’assureur est tenu de prendre en charge les sinistres en cas de survenance du risque. Cette réciprocité des avantages fait du contrat d’assurance un contrat onéreux.

Un contrat onéreux

L’assureur perçoit des cotisations, tandis que le souscripteur bénéficie de la garantie d’assurance, représentant la sécurité acquise. Aucun des deux n’a d’intention libérale. L’intention libérale est présente dans le contrat d’assurance vie, où un avantage est accordé à un tiers bénéficiaire. Les contrats d’assurance sont classés parmi les contrats aléatoires.

Un contrat aléatoire

Un contrat est aléatoire « lorsque les parties acceptent de faire dépendre les effets du contrat, quant aux avantages et aux pertes qui en résulteront, d’un événement incertain ». Or le contrat d’assurance est l’exemple même du contrat aléatoire puisque l’assureur comme le souscripteur ignorent lors de la conclusion du contrat si le sinistre se réalisera et par conséquent si la garantie sera amenée à jouer.

Un contrat à exécution successive Le contrat d’assurance est caractérisé par une exécution successive, où les prestations découlant du contrat se déploient sur une période déterminée, plutôt que de manière instantanée. Ainsi, la garantie offerte par l’assureur perdure normalement aussi longtemps que le contrat est en vigueur.

Un contrat nommé, négociable sur certains points. Le contrat d’assurance est soumis à une réglementation particulière, régie par un ensemble de dispositions légales et réglementaires regroupées dans le Code des assurances. En tant que tel, il est considéré comme un contrat nommé. Les contrats de gré à gré impliquent des stipulations négociées librement entre les parties. À l’inverse, le contrat d’adhésion est défini comme un contrat comportant un ensemble de clauses préétablies et non négociables, définies à l’avance par l’une des parties, en l’occurrence l’assureur.

Le contrat d’assurance Takaful : un contrat d’assurance compatible avec la Charia

Au même titre que les produits financiers sharia compliance, le secteur de l’assurance a introduit des couvertures compatibles avec le droit musulman. Le législateur marocain a permis la création d’opération d’assurance en conformité avec les avis conformes du Conseil supérieur des Ouléma. L’opération d’assurance Takaful repose sur une « couverture des risques dans un contrat d’assurance Takaful par un compte d’assurance Takaful géré, moyennant une rémunération de gestion, par une entreprise d’assurance et de réassurance agréée pour pratiquer les opérations d’assurances Takaful ».

Cette spécificité offre aux croyants des contrats de couverture par des assureurs qui disposent d’un agrément spécial « takaful ». Il n’y a pas de confusion entre les activités d’assurances traditionnelles et les opérations Takaful.

Les opérations d’assurances Takaful et l’activité de gestion du compte d’assurance Takaful par une entreprise d’assurances et de réassurance « ne peuvent, en aucun cas, donner lieu ni à la perception ni au versement d’intérêt ».

Les assureurs Takaful sont rémunérés pour la gestion du contrat, les fonds constitués par les primes versées par les souscripteurs ne peuvent être capitalisés et donner lieu à des intérêts.

Section 2: Les parties au contrat

Les parties au contrat, l’assureur et souscripteur.

Mais il y a également l’assuré et le bénéficiaire qui interviennent aussi dans cette relation

L’assureur et ses représentants

L’assureur est la partie du contrat d’assurance qui s’engage à couvrir le risque spécifié dans le contrat. Une entreprise d’assurance ne peut être une personne physique ; elle doit obligatoirement prendre la forme d’un groupement doté de la personnalité morale, pouvant adopter diverses structures, telles que les sociétés anonymes (SA) ou les sociétés d’assurance mutuelle mutualistes.

Dans le cas des sociétés d’assurance mutuelle, les membres agissent à la fois en tant que sociétaires, participant notamment aux assemblées générales, et en tant qu’assurés, souscrivant des contrats d’assurance et versant des cotisations.

L’existence légale de la compagnie d’assurance

Les sociétés créées sous la forme de S.A.R.L. ne sont pas habilitées à exercer des activités d’assurance, de banque, ni de sociétés d’investissement.

Elles doivent démontrer la disponibilité d’un capital social d’au moins 50 000 000 dirhams, entièrement libéré en espèces au moment de la souscription.

L’article 171 de la 17-99: (modifié par l’article 134 de la loi n°64-12 du 06 mars 2014) Par dérogation aux dispositions de l’article 6 de la loi n° 17-95 relative aux sociétés anonymes, les entreprises d’assurances et de réassurance doivent justifier d’un capital social d’au moins cinquante millions (50.000.000) de dirhams.

Cependant, l’ACAPS peut estimer que si les opérations de l’entreprise d’assurances et de réassurance au regard de ses engagements sont conséquentes, l’Autorité peut exiger la constitution d’un capital social supérieur au minimum précité.

A sa souscription, le capital social doit être entièrement libéré en numéraire. Toutes les actions sont nominatives.

Elles ne peuvent être converties sous la forme au porteur pendant la durée de la société.

Cette exigence repose sur la nécessité d’identification des actionnaires, pour éviter des prises de contrôle masquées, des investissements court-termismes, ce qui pourraient fragiliser les assureurs. Cette législation s’inscrit dans la réglementation prudentielle, pour garantir la solvabilité des sociétés d’assurances.

L’exigence d’un agrément de l’ACAPS

Article 161 : (modifié par l’article 134 de la loi n° 64-12 du 06 mars 2014) (modifié par la loi n°59-13 du 25 août 2016). Les entreprises d’assurances et de réassurance ne peuvent commencer leurs opérations que si elles sont agréées par l’Autorité.

La décision portant agrément d’une entreprise d’assurances et de réassurance est publiée au « Bulletin officiel ». Le secteur des assurances dispose de barrières à l’entrée, ce n’est pas une activité qui peut être exercée librement par toute personne morale.

La société anonyme doit obtenir un agrément de l’ACAPS qui justifie de sa solvabilité et de sa solidité financière pour exercer les activités d’assurance : « elles sont soumises aux règles prescrites par la présente loi quant à leurs conditions d’exercice, leur gestion, les garanties financières qu’elles doivent justifier, leur tenue comptable, leur contrôle et leur liquidation ».

Les activités contrariantes

Il n’est pas possible pour une société d’assurance d’obtenir un agrément pour des opérations d’assurances sur la vie et de capitalisation et pour le reste des opérations d’assurances et de réassurance.

Il existe un certain nombre d’activités incompatibles entre elles selon le législateur. Cette réglementation prudentielle cite trois cas :

– l’agrément pour les opérations d’assistance ne peut être accordé à une entreprise agréée pour d’autres opérations d’assurances ;

– l’agrément pour les opérations d’assurances contre les risques de crédit et de caution ne peut être accordé à une entreprise agréée pour d’autres opérations d’assurances ;

– l’agrément pour les opérations d’assurances ou de réassurance, Takaful ne peut être accordé à une entreprise agréée pour d’autres opérations d’assurances ou de réassurance.

Le contrôle prudentiel s’exerce également dans le cadre les mutations du capital social de la société d’assurance. Changement de capital de la société d’assurance

L’Article 172 de la loi 17-99 : (modifié par l’article 134 de la loi n°64-12 du 06 mars 2014) Tout changement de majorité, toute cession de plus de dix pour cent (10%) des actions et toute prise de contrôle direct ou indirect supérieur à trente pour cent (30 %) du capital social doivent recueillir l’accord préalable de l’Autorité. La réponse de cette dernière doit intervenir dans les trente (30) jours à compter de la date de réception de la demande présentée à cet effet. Tout refus doit être motivé.

L’Autorité peut interdire les acquisitions d’actions ou les prises de contrôle d’entreprises d’assurances et de réassurance lorsque ces opérations sont considérées comme contraires à l’intérêt général.

Le cas des mutuelles qui ont une finalité altruiste

Les sociétés d’assurances mutuelles sont des sociétés à but non lucratif qui :

1° garantissent au profit de leurs membres, personnes physiques ou morales, appelés sociétaires, moyennant le versement d’une cotisation fixe ou variable, le règlement intégral de leurs engagements, en cas de réalisation des risques dont elles ont pris la charge ;

2° répartissent les excédents de recettes entre leurs membres dans les conditions fixées par leurs statuts et après constitution des provisions et réserves et remboursement des emprunts ;

3° n’attribuent aucune rémunération à leurs administrateurs ou aux membres de leur conseil de surveillance à l’exception des jetons de présence et la rémunération accordée au titre d’une autre activité exercée pour le compte de la société d’assurance mutuelle.

Les sociétés d’assurances mutuelles ne peuvent être à cotisations variables que si elles ont un caractère régional ou professionnel.

Les mutuelles au Maroc

  • 11 créées par les personnels du secteur public.
  • 7 créées par les personnels de certains établissements publics.
  • 5 créées dans le secteur privé ;
  • 5 créés par certains travailleurs indépendants et d’autres catégories ;
  • 1 Union (la CNOPS) constituée de 7 mutuelles du secteur public et une relevant du secteur semi-public.

Les intermédiaires d’assurance

L’agent général agit en tant que mandataire pour une ou plusieurs compagnies d’assurance, le représentant dans le processus de souscription et de gestion des contrats d’assurance.

En qualité de mandataire de l’assureur, toute faute commise par l’agent général dans l’exercice de ses fonctions entraîne la responsabilité de l’assureur.

Le courtier

Le courtier n’agit pas au nom d’une entreprise d’assurance, mais plutôt au nom éventuel d’un futur souscripteur, dont il peut être le mandataire.

Son rôle consiste à représenter l’assuré vis-à-vis de l’assureur.

Après avoir évalué le risque à couvrir, le courtier recherche les meilleures offres en termes de prix et de garanties auprès de diverses compagnies d’assurance pour le compte de son client. De plus, ses clients lui confient fréquemment la gestion de leur contrat d’assurance, y compris le paiement des primes et la déclaration des sinistres.

Il peut arriver que le courtier agisse en tant que mandataire d’un assureur, accomplissant diverses tâches au nom et pour le compte de celui-ci, telles que la souscription de contrats et la gestion des sinistres.

Cependant, étant généralement indépendant du mandat de l’assureur, les fautes commises par le courtier n’impliquent pas la responsabilité de l’assureur. En cas de mauvaise exécution du contrat de mandat qui les lie, le courtier assume sa propre responsabilité contractuelle envers son cocontractant, l’assuré.

Le souscripteur

Le contractant ou souscripteur d’assurance est la personne avec laquelle le contrat d’assurance est établi, s’engageant à payer la prime ou la cotisation. Il peut être une personne physique ou morale.

La conclusion du contrat d’assurance peut se faire au moyen d’un mandat général ou spécial, ou dans le cadre d’une gestion d’affaires pour le compte d’une personne spécifique. Il est important de noter que seul le mandant ou le maître d’affaires est engagé, sous réserve que la gestion d’affaires ait été utile ou ratifiée.

L’article 9 de la loi 17-99 dispose que l’assurance peut être contractée en vertu d’un mandat général ou spécial ou même sans mandat, pour le compte d’une personne déterminée. Dans ce dernier cas, l’assurance profite à la personne pour le compte de laquelle elle a été conclue, alors même que la ratification n’aurait lieu qu’après le sinistre.

L’assurance peut aussi être contractée pour le compte de qui il appartiendra.

Cette clause vaut, tant comme assurance au profit du souscripteur du contrat, que comme stipulation pour autrui au profit du bénéficiaire connu ou éventuel de ladite clause. Le souscripteur d’une assurance contractée pour le compte de qui il appartiendra est seul tenu au paiement de la prime envers l’assureur; les exceptions que l’assureur pourrait lui opposer sont également opposables au bénéficiaire du contrat, quelqu’il soit.

L’assuré

L’assuré est la personne dont la vie, dans le cas de l’assurance de personnes, ou le patrimoine, dans le cas de l’assurance de dommages, est exposé au risque aléatoire stipulé dans le contrat.

Il est courant que le souscripteur et l’assuré soient une seule et même personne, comme c’est le cas lorsque l’assuré souscrit une police d’assurance pour son propre compte.

Les types d’assurés

L’assuré peut prendre des assurances de personnes, des assurances de dommages et de RC.

Les clients assurés sont classés en deux principales catégories au sein des entreprises d’assurance et de réassurance :

  • d’une part, les particuliers (couvrant les risques multirisques liés à l’habitation, les accidents, les maladies majeures, etc.),
  • et d’autre part, les entreprises (englobant l’assurance responsabilité professionnelle, les accidents du travail et les maladies professionnelles, etc.).

Section 3: Les conditions du contrat d’assurance

L’article 10 de la loi 17-99 instaure une obligation d’information renforcée de l’assureur vis-à-vis du souscripteur. Cette obligation débute lors des pourparlers avec la remise du projet de contrat .

Le projet de contrat doit contenir « le prix ou une notice d’information qui décrit notamment les garanties assorties des exclusions, le prix y afférent et les obligations de l’assuré ».

A partir de quel moment, le contrat d’assurance est-il formé ?

La proposition d’assurances n’engage ni l’assuré, ni l’assureur; seul le contrat constate leurs engagements réciproques.

L’offre émanant de l’assuré, est considérée comme acceptée, si la proposition est faite par lettre recommandée de prolonger ou de modifier un contrat ou de remettre en vigueur un contrat suspendu, si l’assureur ne refuse pas cette proposition dans les dix (10) jours après qu’elle lui soit parvenue.

Le silence de l’assureur vaut dans ce cas acceptation, mais pas pour les assurances sur la vie.

Le contrat d’assurance doit être obligatoirement écrit.

L’article 11 de la loi 17-99 exige l’écrit mais au-delà, le contrat d’assurance doit être rédigé par écrit, en caractères apparents. Toute addition ou modification au contrat d’

assurance primitif doit être constatée par un avenant écrit et signé des parties. Les présentes dispositions ne font pas obstacle à ce que, même avant la délivrance du

contrat ou de l’avenant, l’assureur et l’assuré ne soient engagés, l’un à l’égard de l’autre, par la remise d’une note de couverture.

Le contrat doit contenir des mentions obligatoires sous peine de nullité.

L’article 12 de la loi 17-99 exige que le contrat d’assurance, qui indique les conditions générales et particulières, est daté du jour où il est souscrit. Il prévoit notamment :

– le nom et domicile des parties contractantes;

– les choses et les personnes assurées;

– la nature des risques garantis;

– le moment à partir duquel le risque est garanti et la durée de cette garantie;

– le montant de la garantie accordée par l’assureur;

– la prime ou cotisation d’assurance;

– la condition de tacite reconduction si elle est prévue;

– les cas et conditions de prorogation ou de résiliation du contrat ou de cessation de ses effets;

– les obligations de l’assuré à la souscription en ce qui concerne la déclaration du risque et les autres assurances couvrant le même risque;

– les conditions et modalités de la déclaration à faire en cas de sinistre;

– Les délais dans lesquels l’indemnité, le capital ou la rente est payé;

– la procédure et les règles relatives à l’estimation des dommages en vue de la détermination de l’indemnité pour les assurances autres que les assurances de responsabilité.

L’Etat est son propre assureur: Les monuments, les bâtiments publics, les édificesne sont pas assurés. Par contre, les flottes de véhicules des ministères, administrations, ..; sont assurés en raison de l’obligation légale, qui ne disposent d’une exonération. Les fonctionnaires disposent d’une couverture médicale pour la maladie, les AT par les mutuelles.

Les assurances et les marchés publics

L’article 25 du Cahier des clauses administratives générales, dit CCAG-T consacre l’obligation d’assurance de l’entrepreneur.

“Avant tout commencement des travaux, l’entrepreneur doit adresser au Maitre d’ouvrage, une ou plusieurs attestations délivrées par un OU plusieurs établissements agrées à cet effet justifiant la souscription d’une ou de plusieurs polices d’assurances pour couvrir les risques inhérents a l’exécution du marché et précisant leurs dates de validité, a savoir ceux se rapportant :

a) aux véhicules automobiles et engins utilises sur le chantier qui doivent être assurés conformément a la législation et à la règlementation en vigueur ;

b) aux accidents de travail pouvant survenir au personnel de l’entrepreneur qui doit être couvert par une assurance conformément à la législation et à la réglementation en vigueur”.

L’exonération du Maître d’Ouvrage

Le maitre d’ouvrage ne peut être tenu pour responsable des dommages ou indemnités légales a payer en cas d’accidents survenus aux ouvriers ou employés de l’entrepreneur ou de ses sous-traitants. A ce titre, les dommages intérêts ou indemnités contre toute réclamation, plainte, poursuite, frais, charge et dépense de toute nature, relatifs à ces accidents sont à la charge de l’entrepreneur

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Samira Benboubker
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